LES ÉNIGMES DE BILHAC À TRAVERS LES SIÈCLES

Le dimanche 17 septembre, l'association Patrimoine Animation Culture de Bilhac a proposé une conférence sur le thème “LES ÉNIGMES DE BILHAC À TRAVERS LES SIÈCLES”.

Cette conférence a été animée par Madame Marguerite GUELY, Présidente de la Société Scientifique, Historique et Archéologique de Brive, que nous remercions chaleureusement.

Avec son autorisation, nous vous proposons la vidéo de cet évènement ainsi que le texte préparé par Madame GUELY :

BILHAC ET L'ABBAYE DE BEAULIEU.

BILHAC est une paroisse très ancienne dont le patron est Saint Martin.

Cette paroisse est citée en 841, au temps des carolingiens. Elle dépend alors, sur le plan religieux de l'évêché de Limoges et, sur le plan administratif, de la vicairie d'Arnac.

Située aux limites du bas Limousin et du haut Quercy, elle appartient alors à un couple de grands propriétaires, nommés Boson et Talasie. Ils vendent en 841, l'église Saint Martin, leur villa domaniale de Bilhac, et les mas alentour. Sans doute, n'ont-ils pas d'enfants. L'acheteur est Rodulphe, abbé de Saint Médard de Soissons, fils de Rodulphe comte de Quercy et de son épouse Aygana de Périgord. Ces derniers sont des notables, possesseurs d'immenses domaines dans cette région de la Dordogne et de la Tourmente. Ils vivent à Sarrazac, où ils se feront enterrer, ou dans leur villa de Condat du Quercy.

Leur fils Rodulphe, moine à Salignac en 823, songe à fonder une abbaye dépendant de Solignac, à Vegennes tout d'abord, puis à Vellinus, bourg de pêcheurs sur la Dordogne, rebaptisé Beaulieu. À la suite de cet achat, Bilhac est attribué au frère cadet de Rodulphe, Robert et à sa femme Rotrude. Robert meurt avant 860, ainsi que ses fils. Rotrude, veuve, cède sa part de Bilhac à Rodulphe, devenu archevêque de Bourges. Ce dernier, l'année suivante, donne la paroisse à la jeune abbaye de Beaulieu. C'est l'office monacal du pitancier, qui en reçoit les rentes.



LE SORT DE TALASIE DEVENUE SAINTE ALAUZIE

Talasie, la femme de Boson, la vendeuse de 841, est restée dans la mémoire locale jusqu'à nos jours, sous le nom un peu déformé de Sainte Alazie ou Alausie. La même déformation a atteint Gauzla, épouse d'Adhémar, vicomte, vers 930. Elle est appelée par [es gens de Tulle, Sainte Graule.

En 1315, Aymeric Cayrel demoiseau de Queyssac vend à Guillaume des Combes, clerc de Queyssac, deux setiers de froment de rente dues par Bernard del Solier de Bilhac sur une terre située dans la paroisse de Sainte Alausia, confrontant le chemin de Bilhac à la fontaine de la Combe. Prix 100 sous.

En 1432, à la fin de la guerre de Cent Ans, le vicomte de Turenne, Pierre de Beaufort arrente ( ou loue) le ténement de Sainchalaunia et le village du Solier Vieilh, à trois paysans : Jean la Roche de Nonards, Jean Durand et ses neveux de Mascheix et Pierre Manha. Les vignes sont abses ou abandonnées, les maisons sont des ayriaux c'est-à-dire des ruines. Bilhac, proche de la Dordogne, terre de parcours des routiers, a été dépeuplé.

En 1516, les habitants de Puymerle et ceux du Masvidal se disputent la possession du Bos vieilh. Ce bois confrontait le mas del Solier, le chemin de Queyssac à Puybrun entre les deux, le Masvidal et le mas de Grimai.

En 1639, lors d'un procès au sujet de la justice haute du Masvidal, qui est au vicomte et la justice basse, qui est au seigneur de Floirac, il est précisé que les ténements de Sainte Alauzie, les Beynias, la Veugiere, Lestandon sont contigus et tenus, de mémoire perdue, du seigneur de Floirac. Mais Saint Alauzy dépend du vicomte, qui en a l'entière jouissance et seigneurie. La preuve en est qu'il a été arpenté par Pierre de Beaufort en 1432 et par Agne de la Tour en 1467. Le Masvidal a été vendu en 1619 à Jean de la Renaudie par le seigneur de Floirac. Pierre Floret, avocat de Beaulieu, le rachète et se titre seigneur du Masvidal. Le vicomte intervient : Le sieur Floret a usurpé une partie du ténement de Sainte Alauzie qu'il a inclu dans les terres du Masvidal. À Saint Alauzy, les tenanciers du vicomte sont M° François Fargues de Malhuret, M° Pierre Clare notaire, Jean Clare maçon et Antoine Masvidal_ Ils s'opposent à la saisie de leurs biens, demandée par le sieur Floret pour défaut d'hommage, disant qu'il n'a pas la haute justice.

Un dernier regard sur Sainte Alausie : en 1921, il est question du règlement des eaux de la fontaine de Saint Alazi, entre mrs Mazeyrat, Tronche, Laborie et Chapoux. Les prés arrosés portent les noms de pré d'En Bas, de Gubert, du Touron, de Bonneval, de Masvidal, de Soursac, de Croze, de Cossignol et de Saint Sauve. Ce règlement daterait de 1871.

Ainsi, Sainte Alauzie est d'abord qualifiée de paroisse, puis de ténement, c'est à dire territoire inhabité, puis masculinisée en partie et attribuée au Masvidal et enfin dotée d'une fontaine. Elle se situe entre Masvidal et Puymerle Qu'en reste-t-il 100 ans plus tard ?



LE LIEU DU MARTRET OU DE COMBE MARTRET

Un Martret, ( ou les Martys) désignent de très anciens cimetières, qui datent des premiers temps de la christianisation, lorsque les gallo-romains avaient coutume d'enterrer, ou d'incinérer les corps, à l'extérieur des lieux habités, sur une colline exposée au sud, à proximité d'une source. C'est donc l'indice d'une communauté très ancienne, établie avant que les fidèles prennent l'habitude d'enterrer leurs morts autour de l'église, Ad Sanctos. Ou même, dans l'église_ On trouve des Martret dans de très anciennes paroisses, à Collonges, à Venarsal, et à Bilhac. Le propriétaire gallo-romain, ou mérovingien, christianisé plus tôt que ses serfs, a bâti une chapelle de domaine, baptisée peut-être Saint Martin.

Une autre sainte est vénérée à Bilhac : Sainte Radegonde. En apparence, c'est la célèbre abbesse de Poitiers, mais c'est surtout, dans une paroisse à la frontière des Lémovices et des Cadurques, un lieu-dit Rand ( ou frontière) devenu Icoranda, parfois transformé en Eygurande et parfois en Radegonde_ Comme pour Talasie, Radegonde devient Sainte Radegonde. Ce lieu devait se trouver auprès de la limite entre Bétaille et Bilhac, du côté du Masvidal.

Pour en revenir au Martret, citons en 1325, la vente faite par Pierre del Teyssendier, clerc de Bilhac, à M° Guillaume des Combes, clerc de Queyssac et à Pierre Cayrel, son parent, d'une rente de deux setiers de froment sur une vigne à Escorgarat et sur une terre appelée del Martret, confrontant la vigne de Géraud de Murat et celle des héritiers de Guillaume de Roanne_ Notons la présence de vignes, donc d'un terrain ensoleillé.

En 1539, noble Jean de Leymonie, sieur de Bilhac reconnaît tenir du vicomte de Turenne, la moitié du château de Bilhac et la moitié de trois vignes, dont l'une est située à la Combe du Martret, ou des Martys confrontant la vigne des héritiers de Raymond de Marty et la vigne de François Clare de Bilhac. Il reconnaît aussi la moitié du domaine appelé la Borie de la Forsse.

Jean de Leymonie est le fils de Pierre de Leymonie ( le premier à se prétendre seigneur de Bilhac ) et de Jeanne de Courson. Il est l'époux d'Antoinette de Lostanges. Il va céder, à la Combe du Martret, à Astorg de Corn, seigneur de Queyssac, des rentes en froment.

Cette Combe de Martret est une terre à vignes, qui ne se trouvent pas au fond de la combe, mais sur les pente ensoleillées qui l'entourent, comme l'était l'ancien cimetière. Ces vignes ont une telle réputation qu'on vient d'Auvergne, lors de vinades annuelles, en récupérer le précieux breuvage. On peut noter aussi la transformation de Martret en Martys et le transfert de ce nom à une famille locale.

La famille des Martys, qui était composée de trois frères, ( lors du repeuplement, au milieu du 15° siècle ), s'est installée dans les ruines de la vieille forteresse de Puymerle . Depuis, elle a grandi et prospéré. En 1508, les Martys sont douze chefs de famille, oncles et neveux, à exploiter les trois parts indivises des ayriaux, cazals, four, terres, bois et fontaines, tout autour du Podio Merula et hors des fossés de la forteresse. Très prolifiques, les Martys ont essaimé à Rouanne, Tartacede, les Bothies et, de l'autre côté du Palsou, à Caussaronhe et au Sol vieilh.

Cette forteresse de Puymerle appartient aux Ornhac, après avoir été aux Saint Julien. Elle rend hommage directement au vicomte et avait eu pour but la surveillance de la vallée du Palsou et de la vieille route menant au Puy d'Arnac. Peut-être aussi de la frontière Limousin Quercy avec son avant poste de la Forsse.

À Bilhac, lui appartiennent le village de Rouanne, le ténement de Combe Martret et d'Ourchamp contigus, qui confrontent : les Bothies et Tartacede à l'est, le lieu de Bilhac et Masvidal au sud et à l'ouest, le Palsou et Queyssac au nord.

Quant au bourg de Bilhac et aux autres villages, ils font partie de la châtellenie de Bétaille et nul ne peut se dire seigneur de Bilhac, hormis le vicomte.

En 1527, Astorg de Corn seigneur de Queyssac achète Puymerle aux Ornhac Saint Chamans. Ces derniers contesteront la vente et ne se résigneront qu'en 1580, à abandonner définitivement ce château en ruine, qui avait titre de baronnie et possédait des rentes le long de la Dordogne d'Altillac à Gagnac et d'Astaillac à Liourdres.

Revenons à la Combe Martret : en 1649 M° Guillem Queyrille, praticien de Puymerle et Jean Lestrade dit de Marty, reconnaissent tenir d'Antoine de Corn, seigneur de Queyssac, le ténement de Combe Martret. Il confronte le chemin de Puymerle à la Chaminade et, devers le fond, le chemin de la Chaminade à Bilhac, et le champ du sieur de Bilhac. C'est un tout petit territoire, qui ne fait qu'un demi hectare et ne paie qu'une rente de deux quartons de froment. Le champ du seigneur de Bilhac est en réalité couvert de vignes et rappelle la moitié de vigne reconnue en 1539, par Jean de Leymonie au vicomte de Turenne.

La proximité de la Chaminade permet de situer l'ancien cimetière et rappelle d'autre part qu'une caminade, ou chaminade est une maison pourvue d'une cheminée, luxe rare au moyen âge et souvent maison du curé ou d'un clerc»

Nous ne sommes pas loin de Sainte Alausie située entre le Masvidal et Puymerle.



LE LIEU DE NAISSANCE DU PAPE SYLVESTRE II 999-1003.

Gerbert est né en Aquitaine vers 938-945 d'une famille très modeste.

Moine à Aurillac, au temps de l'abbé Géraud de Saint Céré, il en est tiré en 963, par le comte de Barcelone, Borrell, séduit par son intelligence. Il va suivre durant cinq ans, le quadrivium à l'abbaye de Vich : arithmétique, géométrie, musique et astronomie. Il y découvre les chiffres arabes et conçoit une abaque, c'est-à-dire une table d'opérations. Emmené à Rome en 970, il va être mêlé à la politique de l'empereur Othon II et d'Hugues Capet. Il est nommé écolatre ( professeur) à Reims par Adalbéron, l'archevêque. En 992, il est archevêque à son tour, mais se brouille avec Hugues Capet et quitte la France pour devenir précepteur du jeune Othon III. Il devient archevêque de Ravenne, puis pape sous le nom de Sylvestre II .

Ses contemporains, étonnés par tant de science et de connaissances, l'ont accusé d'être un magicien, ou un sorcier. Il va tenter, dans son trop court pontificat, d'unir la papauté et l'empire dans un régime politique et religieux.

À Aurillac, qui se glorifie de l'avoir eu comme moine, circulent des traditions, sur le lieu de sa naissance et sur ses parents_ Il serait né dans un lieu dit Belhiac, à 6 km d'Aurillac et son père se nommerait Angilbert.

En 1998, Jacques Juillet, auteur de livres sur la baronnie de Castelnau, qu'il appelle poétiquement le pays des quatre rivières, émet l'hypothèse que le lieu de naissance de Gerbert soit Bilhac. Il s'appuie sur le cartulaire de Beaulieu.

En 894, Aganus et sa femme Ragniberge donnent à Saint Pierre de Beaulieu, des forêts dans la vallée du Palsou, entre Barennac et la Font partida de Queyssac_ Ils donnent aussi dans la villa Ad illa Calm, le mas de Gerbert. Parmi les témoins de l'acte : Agilbertus, qui fut déjà témoin en 861, lors de la donation de Bilhac, par Rodulphe, à l'abbaye de Beaulieu.

En 916, Basenus et sa femme Hélène donnent le quart de ce qu'ils possèdent dans la même villa. Ad illa Calm serait La Chal, village de Bilhac.

On peut objecter à Mr Juillet que ces donations se déroulent plus de cinquante ans avant la naissance de Gerbert et qu' Agilbertus ne peut pas être son père, mais un aïeul. Le mas de Gerbert ne peut pas s'appeler ainsi à cause de lui, mais peut-être à cause d'un éventuel grand-père.

On pourrait aussi objecter que ces dons concernent Beaulieu et non Aurillac.

Mr Juillet observe que le découvreur du jeune berger est l'abbé Géraud de Saint Céré et que son maître des études fut Raymond de Lavaur, originaire de Gagnac. Ainsi, avec Saint Céré et Gagnac, nous nous rapprochons de Bilhac. D'ailleurs . le pape se dit aquitain et non auvergnat. On pourrait lui objecter aussi qu' Agilbertus n'est pas d'une famille si modeste que ça, puisqu'il est témoin d'actes importants. Peut-il avoir un fils berger ? Mais cette tradition est-elle si fiable ? Les moines n'ont-ils pas exagéré la médiocrité de la famille de Gerbert, pour mieux prouver leur aptitude à détecter de bons sujets ?

Un autre argument, pour le moins curieux, est pour Mr Juillet, la forme inusitée du clocher de Bilhac, en forme de tiare pontificale !

Ce qui va nous mener à parler de l'église Saint Martin de Bilhac_



INTERROGATIONS SUR L'ÉGLISE SAINT MARTIN DE BILHAC.

C'est une église romane, qui a remplacé l'église carolingienne entourée de champs, de la vente de 841 et du don à Beaulieu en 860.

L'abbé Poulbriere la décrit comme un peu petite et un peu sombre. Elle a conservé, intact, son chœur en berceau et son abside à pans coupés inégaux, décorée de modillons. Au sud de la nef, une chapelle seigneuriale avec banc et sépulture, date du 15° siècle

À l'extérieur, le clocher, tout récemment refait, nous dit l'abbé, qu'on construisit alors sur ces murailles, est tout entier en charpente, et a la forme singulière d'une tiare aiguë : il s'élevait autrefois en batiere sur les parois du choeur.

Retenons de cette description, que le clocher est, pour l'abbé, assez récent. Il date peut-être du Second Empire, ou des débuts de la 3° République. On peut seulement se demander ce qui a poussé l'architecte à adopter cette forme de tiare.

L'abbé n'accorde au retable, qu'un coup d'oeil discret, il note cependant qu'il a été commandé par un curé Geoffre, en 1717. Dans ses notes, ( qu'il n'a pas publié dans son volumineux dictionnaire des paroisses ), il ajoute : joli retable dû, dit-on, au ciseau des moines de Bonnaigue. Il faut dire que, lors de sa visite en 1891, le curé était absent et Mr Bonneval, le châtelain de Bilhac, s'était chargé de le renseigner.

C'est Mr Bonneval qui écrit, sous sa dictée, la liste des reliques trouvées dans la sacristie : celles de Saint Germain évêque, de Saint Martin, de Saint Thomas apôtre, arrivées avant la Révolution. En 1835, en provenance de Rome, une partie ? du voile de la Vierge, des reliques de Saint Martin et de Sainte Radegonde.



QUESTIONS À PROPOS DE L'ÉGLISE

Pourquoi l'abbaye de Beaulieu n'a-t-elle pas fait de Bilhac un prieuré et s'est-elle contentée d'en présenter à l'évêque de Limoges, un curé, d'ailleurs assez bien pourvu, puisqu'il paie chaque année 440 livres de décime, soit presque 5 000 livres de revenu ?

La chapelle est-elle vraiment seigneuriale, sachant que le seul seigneur de Bilhac est le vicomte de Turenne, qui a sa litre funéraire à l'extérieur de l'église ?

Le retable est-il dû aux moines de Bonnaigue et pourquoi le curé Geoffre se serait-il adressé à eux ?

Revenons à l'abbaye de Beaulieu

Des immenses biens qui lui furent donnés au 9° et 10° siècles, les abbés n'ont réussi à sauver que des paroisses proches, ou des biens proches de Cazillac.

Les Castelnau et plus tard, les Turenne, ont mis la main sur une partie des dîmes et des rentes, pour les donner en récompense à leurs chevaliers.

La dîme de Bilhac, c'est à dire le dixième des récoltes, est inféodée, en 1296, au demoiseau Aymeric de Puymerle, dit de Saint Julien ( le Vendonnais ). Il en rend hommage, non à l'abbé de Beaulieu, ( bien qu'il soit alors à Beaulieu, dans la chambre voisine de la salle du chapitre ), mais à l'évêque de Limoges_

L'année suivante, son fils ? Pierre de Saint Julien, rend le même hommage à Curemonte, ( dans la chambre du précepteur de l'ordre de Saint Jean ), toujours à l'évêque de Limoges.

Cette inféodation au châtelain de Puymerle est, sans doute, la récompense de ses services, par le vicomte de Turenne.

Il ne faut pas oublier que Bilhac dépend alors de la châtellenie de Bétaille.

Le pitancier, office monacal de Beaulieu, n'a réussi à obtenir du curé de Bilhac, qu'une rente symbolique de 20 sous_

Les curés ne sont donc pas des moines, mais des prêtres séculiers. Les revenus qu'ils reçoivent attirent les cadets de familles nobles, ou bourgeoises.

Ainsi en 1433, Gérald de Maysse, de la famille noble de Lostanges, apparentée aux Aymar. En 1457, Hugues de Naguirande d'une famille bourgeoise d'Altillac.

Beaucoup plus tard, et après la période protestante en Vicomté, Claude Fabre, d'une famille bourgeoise de Curemonte, dont les armes, une enclume, disent assez l'origine manuelle de la famille. Mais à sa suite, en 1665, trois curés successifs, d'oncle à neveu, occupent la cure de

Bilhac. Ce sont des Geoffre de la Pradelle, famille noble de Sainte Féréole, dont Jean Paul, né en 1623, curé de 1667 à 1697, Géraud, son frère, né en 1625, curé de 1697 à 1714. Il meurt en 1717 à l'âge respectable de 92 ans, et enfin Antoine, leur neveu, né en 1690, qui prend possession en 1714 et résigne en 1747. Il mourra à Bilhac en 1757, âgé de 67 ans.

Leur succède l'abbé Raymond de Sainte Marie, constructeur du presbytère, mort en 1777. Tous ces prêtres, docteurs en théologie, ont eu à coeur de s'occuper de leur église et de la doter de statues et de mobilier.

La Chapelle du 15° siècle de l'église de Bilhac est-elle seigneuriale ?

Nous savons, grâce à de nombreux procès, que celui qui se considère comme le patron et le fondateur de l'église de Bilhac est le vicomte de Turenne, lointain descendant de Boson et de Talasie. À ce titre, il est le seul à pouvoir mettre sa litre funéraire dedans et en dehors de l'église. En revanche, au 15° siècle, nombre d'églises trop petites et à peine relevées des ruines, laissées par la guerre de Cent Ans, ont vu de nombreuses chapelles funéraires encadrer la nef Elles ont accueilli le tombeau et le banc de familles nobles ou bourgeoises, qui en avaient fait la dépense, pour se distinguer du commun peuple.

C'est le cas à Bilhac des Leymonie. Au début du 15° siècle, vivent à Bilhac, Pierre Leymonie et son épouse Gina de Bilhac. Leurs fils, Pierre aumônier à Beaulieu, Arnault et Hélie sont vers 1450, en conflit avec le jeune vicomte Agne de Beaufort. Hélie, demoiseau, procureur de son père, refuse de rendre hommage et commence à bâtir à côté de leur maison de Bilhac, une tour fortifiée de mâchicoulis et de canonnière. Il est probablement le constructeur de la chapelle. Si le vicomte tolère la chapelle, il n'est pas d'accord pour la transformation d'une maison en forteresse. Il lui faut attendre l'issue d'un long procès, en 1473, pour qu' Hélie Leymonie, simple sieur à Bilhac, et non seigneur, démolisse ses ouvrages militaires.

Au 18° siècle, une autre humiliation était réservée à Charles de Gontaud, sieur de Bilhac, par l'acheteur de la châtellenie de Bétaille, Jean Joseph Dambert, sieur de la Tourette et nouveau seigneur haut justicier de Bilhac. À ce titre, il lui ordonne de rendre hommage, lui défend de se titrer seigneur de Bilhac, et l'enjoint d'effacer la litre funèbre de son père, Jean Jacques de Gontaud. Il prétend même lui enlever le droit de tombeau et le banc de la chapelle.

L'humiliation est d'autant plus grande que les Gontaud prétendent descendre, bien que de la main gauche, des Gontaud Saint Geniés, ou Cabrerets. Les Dambert n'ont, pour aïeux, que des marchands de Curemonte ! En 1759, le sieur de Bilhac doit effacer sa litre, mais garde son tombeau et son banc.

En 1778, le dernier des Gontaud, Charles II, meurt après avoir testé en faveur de Catherine de la Grange, fille d'un bourgeois de Bétaille, épousée l'année précédente, lésant ainsi ses frères et soeurs. Catherine, qui n'a pas d'enfant, se remarie en 1788, avec Bertrand Clare de Peyrissac, ancien capitaine de grenadiers. En 1792, il est en Lorraine et considéré comme émigré. Ses biens sont séquestrés, mais Catherine, une maîtresse femme, réussit à faire lever le séquestre. En 1865, son fils, Raymond Clare vendra le château et ses archives à Mr Bonneval.

Il nous reste à parler du retable du 18° siècle.

À l'époque de l'abbé Poulbriere, les curés considèrent les retables, écaillés et empoussiérés, comme de vieilleries, bonnes à remplacer par de marbres ou des autels plus modernes. C'est aussi l'époque où l'on réouvre les fenêtres romanes des absides, dissimulées par les retables. D'ailleurs, l'abbé remarque qu'on aurait pas manqué à Bilhac, d'y faire la réouverture de la fenêtre médiane du sanctuaire, si on n'avait eu égard à un retable assez bon, portant au flanc le souvenir d'un curé vénérable Geraldus Geoffre rector 1717.

Seul, Victor Forot, qui se livre à un inventaire des communes en 1887, remarque et décrit les retables. Cet inventaire sera réactualisé en 1905, après la séparation des églises et de l'état. Dans un article paru de 1912, dans le bulletin de la SSHAC, il décrit le retable de Bilhac en termes enthousiastes, bien qu'il soit trop doré et barbouillé de peinture. Il est particulièrement charmé par les colonnes torses, les guirlandes de feuillage et par les statuettes du tabernacle.

Il ne croit pas qu'il soit dû au ciseau des moines de Bonnaigue, mais il n'en cherche pas l'auteur Il faudra attendre les années 2000 pour qu'Olivier Geneste, auteur d'une thèse sur le mobilier des églises du Périgord au 17° et 18° siècles et spécialiste du mobilier de la même époque, en Corrèze, identifie le sculpteur du retable de l'église de Bilhac : Pierre Lacheze, maître sculpteur à Brive.

Pierre Lacheze est né à Meymac, en 1665 et mort à Brive, en 1710_ Au cours de sa brève existence , il s'est marié trois fois et n'a pas eu de descendance, sinon une fille. Il a surtout travaillé autour de Brive, à Sainte Féréole , Malemort, Sadroc, Donzenac et sur le Causse, à

Chartriers et Pazayac en Dordogne. Il a dû faire la connaissance des Geoffre de la Pradelle, lorsqu'il a travaillé à Sainte Féréole. Ils habitaient en face de l'église. Ce qui trouble Olivier Geneste, c'est que Pierre Lacheze était mort depuis 7 ans, quand le retable semble avoir été posé, comme en témoigne la date de 1717 . Mais il faut se rappeler que Géraud Geoffre a été curé de 1697 à 1714, date à laquelle il a résigné. La date de 1717 est celle de sa mort et pas nécessairement celle de la pose du retable. Olivier Geneste fait paraître son livre sur les églises de Corrèze, cette année, à la foire du livre.



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